un nouveau départ [PV Eliseth]

Une jeune fille d'une vingtaine d'année entra dans le grand hall de l'université française de Lucie des Lys. Pas trés grande, mesurant dans les 1m60, cheveux chatains tombant sur ses épaules et un regard d'un bleu clair et pur, Lou posa ses valises sur le sol. Un taxi l'avait amené jusqu'ici et l'avait abandonné à l'entrée. N'étant encore jamais venu dans cette université, elle ne connaissait personne et, ce qui était encore plus embêtant, c'est qu'elle ne connaissait pas les lieux : et pour une aveugle, cela allait être dur. Elle ne savait pas quelle idée l'avait poussé à quitter son ancienne université où elle avait redoublé deux fois sa premiére année de psycho. Peut-être les profs ? Peut-être les élèves ? Peut-être l'université elle-même ? Elle ne savait trop quoi répondre à la question. Elle soupira. Elle ne savait pas par quel bout s'y prendre. Elle entendait des voix autour d'elle mais pas une seule qui semblait vouloir s'interresser à elle. Elle soupira une nouvelle fois. Encore une fois, elle se sentait bien seule. Lou espérait que cette université serait mieux que la premiére et que les élèves acceptaient les personnes telles qu'elles étaient. Un bruit de pas se rapprochant d'elle, la jeune fille tourna la tête vers la droite.

Eliseth regardait depuis un bout de temps la jeune fille qui venait d'arriver. Elle squattait dans le hall en attendant un ami. Elle se dirigea vers la jeune fille, voyant que manifestement celle-ci était non-voyante, et qu'un garçon venait de la bousculer. Elle s'approcha d'un pas vif. Elle prit la main de la fille et déclara de sa voix vive et joyeuse.

Salut, je suis Eliseth. Je vais te filer un coup de main, si tu veux.

Elle ne voulait pas être trop abrupte, mais la jeune fille avait l'air sympa et complètement perdue. Elle la regarda attentivement, attendant la réponse.

Je sentis alors une main dans la mienne et une voix joyeuse me dire :

Salut, je suis Eliseth. Je vais te filer un coup de main, si tu veux.

Eliseth ? J'aimais bien la consonnance de ce nom.

Je veux bien s'il te plait. Laisse moi juste le temps de prendre mes affaires.

Je me baissais et ramassais mes deux valises. Maintenant, je ne savais plus où se trouvait Eliseth. Il y avait beaucoup de bruit dans le hall d'entrée. Je regardais à droite et à gauche. Je dis alors d'une toute petite voix :

Eliseth ? Où es-tu ?

La jeune fille avait accepté sa proposition, Eliseth était heureuse à l'idée d'être utile. La jeune fille semblait complètement paniquée si bien qu'Eliseth lui prit doucement un de ses valises pour la porter. De l'autre main, elle saisit la main de Lou et la rassura.

Je suis là.

Elle se rappella soudain qu'elle ne conaissait même pas le nom de la jeune aveugle. Elle sourit, même si celle-ci ne pouvait pas le voir, et demanda gentiment.

Au fait, c'est quoi ton nom à toi?

Je sentis une main prendre l'une de mes valises et m'attraper ma main libre. J'entendis la voix d'Elizeth retentir dans le noir :

Je suis là.

Sa voix était rassurante. Elle m'apaisa et guidée par la jeune fille, nous nous frayâmes un chemin vers les escaliers. Alors que nous étions en train de marcher, elle me demanda :

Au fait, c'est quoi ton nom à toi?

Je souris. Je lui répondis :

Je m'appelle Lou.

Un grand bruit se fit alors entendre sur notre droite. Cela me fit sursauter et je laissais tomber ma valise sur le sol.

Eliseth fusilla du regard la bande de garçons qui venaient de faire s'écrouler le tableau d'affichage. Elle les incendia :

Calmez-vous un peu!

Elle se retourna vers Lou et lui confia d'une voix rassurante :

Ne t'inquiète pas, ça n'était rien.

Elle prit le chariot a bagages qu'elle avait réussi à intercepter et positionna les deux valises dessus tout en continuant de parler à Lou.

Et bien Lou, je suis ravie de faire ta connaissance.

Elle lui saisit doucement la main et l'entraîna, toujours en poussant le chariot d'une main.

Elizeth sembla parler à des personnes. Ils semblaient avoir fait quelque chose. Elle me rassura bien vite :

Ne t'inquiète pas, ça n'était rien.

Je lui souris et je cherchais mes valises mais Elizeth les avait posées sur un porte-bagages. Je la remerciais d'un sourire. Elle me prit la main et me dit :

Et bien Lou, je suis ravie de faire ta connaissance.

Moi aussi Elizeth! Moi aussi...

Nous continuames à marcher dans les couloirs et je rompis le silence en posant une question à Elizeth :

Pourquoi les gens sont-ils méchants ?

Eliseth baissa la tête à la question de Lou. C'était interéssant, comme question. Elle se demanda si Lou avait souvent eu à subir des moqueries à cause de sa cécité. Elle se dit que oui, sûrement. Des gens méchants...elle en avait eu à subir. Du moins le croyait-elle. Mais Eliseth décida de ne pas s'apesantir sur ses problèmes et essaya de répondre à Lou.

Je ne sais pas vraiment...avoua-t-elle. Peut-être parce qu'ils n'ont rien qui les rendent heureux, alors ils ont besoin de faire du mal aux autres...Est-ce que tu as eu affaire à des gens méchants dans cette université?

Nous marchions en silence pendant quelques secondes puis Elizeth prit la parole pour répondre à ma question :

Je ne sais pas vraiment... Peut-être parce qu'ils n'ont rien qui les rendent heureux, alors ils ont besoin de faire du mal aux autres...Est-ce que tu as eu affaire à des gens méchants dans cette université?

Je restais quelques instants en silence puis répondis :

Un jour, Dia m'avait emmené voir son grand-père. C'était un grand sage africain. Il nous a raconté cette histoire : il était une fois, dans un coin reculé d'afrique, en plein milieu du Sahara, un oasis. Un vieille africain était assis à l'ombre d'un baobab quand un voyageur, montant un chameau arriva. Il s'adressa au grand-pére :

- Bien le bonjour Grand-Père !

Le grand-père resta silencieux mais salua le nouveau venu d'un signe de tête.

- Dis-moi Grand-Père, comment sont les gens ici ?

Le grand-père le regarda droit dans les yeux et lui posa une question à son tour :

- Et par chez toi, comment sont les hommes ?

- Ils sont méchants, arrogants et vicieux.

- Alors, tu trouveras ici des hommes méchants, arrogants et vicieux.

Le voyageur passa sa route. Deux heures plus tard, un autre voyageur, montant un chameau, arriva à l'oasis et salua le grand-pére :

- Bien le bonjour Grand-Père.

Comme la premiére fois, le grand-père ne dit rien et salua le nouveau venu avec un geste de la tête. Comme le précédent, le voyageur demanda :

- Dis-moi Grand-Père, comment sont les gens ici ?

Le grand-père le regarda droit dans les yeux et lui posa une question à son tour. La même qu'il avait posé à son prédécesseur :

- Et par chez toi, comment sont les hommes ?

- Ils sont gentils, attentifs et jovials.

- Alors installes-toi ici. Tu trouveras des hommes gentils, attentifs et jovials.

Un homme qui était en train de bêcher son champs un peu plus loin avait suivit toute la scéne. Ne comprenant pas les paroles du vieux africain, il s'approcha et lui demanda :

- Grand-père, je ne comprends pas. Pourquoi n'as-tu pas fait la même réponse aux deux voyageurs alors que tu leur as posé la même question ?

Le vieillard sourit et dit alors :

- Mon jeune ami, si de là où tu viens, tu trouves que les gens sont méchants, vicieux et arrogants alors partout où tu iras, les gens seront méchants, vicieux et arrogants. Au contraire, si de là où tu viens, tu trouves que les hommes sont gentils, attentifs et accueillant, alors partout où tu iras, les hommes seront gentils, attentifs et accueillant.

Je me tus. Un courant d'air passa dans le couloir où nous étions. Je frissonais. Je répondis alors à sa question d'une façon que l'on qualifirait de bizarre pour les personnes qui n'ont pas l'habitude de ce genre de réponse :

Les hommes ne naissent pas méchants, ils le deviennent. Il se peut que la vie ne t'ai pas gâtée mais sache que personne ne peut remplacer ce que tu as de bon à donner. Si tu décides d'enfouir ce qu'il y a de bon en toi tout au fond de ton coeur et que tu en fermes la porte, apprends à te tourner vers quelqu'un qui a su enfermer le mauvais à double tour tout au fond de soi et laisser rejaillir le bon de son être.

Je lui souris et attendis en silence qu'elle me dise ce qu'elle pensait de ce que je venais de lui dire.

Eliseth hocha la tête, remuant cette phrase dans sa tête. Elle lui paraissait de circonstance.

Je crois que tu as raison.

Elle se mordit les lèvres et sentit les larmes perler à ses yeux. Sa grand-mère lui avait dit quelque chose de semblable un jour...
Eliseth eut alors une sorte de flash-back. Elle se souvint du visage de sa grand-mère froid, si froid...Elle revoyait son père l'enfermer, à peine âgée de dix ans, dans sa chambre, avec des paroles si cruelles...Elle se souvint du visage de Marine, lui reprochant de n'être qu'un fardeau, tordu par la colère... Eliseth revit aussi le médecin, cet homme au rictus moqueur, qui se fichait de ce qu'elle pensait...Elle revit enfin le tuyau qui coulait, comme pour l'étrangler, et qu'elle essayait d'arracher.

Sans un mot, elle continua le chemin.

Je sentis que quelque chose avait changé dans l'attitude de ma compagne. Je m'arrêtais brusquement.

Elizeth...

Je savais qu'elle m'écoutait. Mais je voulus m'en assurer :

Elizeth ! Ecoute-moi !

Les autres étudiants ne semblaient pas prendre conscience de ce qui se passait mais peu importe.

Elizeth ! Ne te refermes pas sur toi-même ! Toi et moi nous ne nous connaissons pas depuis longtemps mais promet moi de parler à quelqu'un ! Ne reste pas seul...

Je ne sus ce qu'elle répondit car je me fis bousculer une seconde fois par un plus agé que moi. Je tombais sur le sol...

Eliseth n'avait pas eu le temps de réagir qu'un type avait bousculé Lou et que la jeune aveugle s'était retrouvée par terre. Elle revint instantanément à la réalité et se précipita vers Lou. Elle s'agenouilla à côté d'elle et lui prit les deux mains. Elle questionna, inquiète.

Lou, ça va? Je suis là. Tu n'as rien?

Elle lanca un regard noir au garçon qui s'empressa de filer sans demander son reste. Lou avait l'air secouée.

Elizeth m'aida à me relever. Elle me demanda :

Lou, ça va ? Je suis là. Tu n'as rien ?

Un peu étourdie, je ne répondis pas tout de suite et tentait de reprendre mes esprits tant bien que mal.

Ca va aller ! Merci bien !

Interieurement, je me demandais pourquoi quelqu'un m'avait bousculé ? Peut-être ne l'avait-il pas fait exprés ? Je ne le saurais jamais. C'est pourquoi je lui pardonnais tout de suite son geste !

Je suis dans la chambre 3F ! Tu veux bien me montrer où elle se trouve s'il te plait ?

Lou demanda à Eliseth de la conduire à sa chambre. Eliseth serra la main de la jeune aveugle plus fort dans la sienne et elle l'emmena avec elle vers les chambres. Bien qu' encore secouée, en regardant Lou qui la suivait avec une totale confiance, elle ressentit un bruque élan d'affection pour elle. Ellie prit soudainement une décision...

* Je ne laisserais personne lui faire du mal *

Eliseth sentait en son fort intérieur qu'elle n'avait pas le droit de laisser qui que ce soit tromper la confiance de Lou. Parce qu'elle n'avait jamais vu quelqu'un se fier autant à elle.
Elle poussa la porte et elles se retrouvèrent à l'extérieur.

Par là, indiqua-t-elle.

chambre de Lou

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